" Avant l'instruction, il y a l'éducation " Souronov, maréchal
Russe.
" Les médiocres ont finalement raison de tout "
Nicolas Vassiliev Déc 96 Sur le point de rejoindre sa Yakoutie natale,
Nicolas Vassiliev, directeur des services généraux, a eu l'obligeance
de nous accorder la présente interview avant de disparaître des couloirs
de notre école. Caustique, réaliste et rigoriste, il faut avouer
que le Vassiliev que nous avons interrogé se situe bien loin de la réputation
dont on l'affuble habituellement. On vous laisse juger par vous-mêmes
Impert'
: Monsieur Vassiliev Bonjour. M. Vassiliev : Bonjour. Impert': Tout d'abord,
nous aimerions savoir de quelle manière va s'organiser l'administration
vis-à-vis de votre départ ? M. Vassiliev : En fait, le poste
que j'occupais jusque-là rend la transition facile. En effet, je dirigeais
2 services à l'ESSEC en plus de l'ALEGESSEC. Les personnes composant ces
services sont suffisamment compétentes pour pouvoir se débrouiller
sans moi et seront placés sous l'autorité de Françoise Rey.
Quant à l'ALEGESSEC, je ne connais pas encore le nom de mon successeur.
Impert' : Quelles sont vos impressions avant de partir ? M. Vassiliev : Je
pars battu de n'avoir réussi à mettre en uvre dans l'école
tous les projets qui me tenaient à cur, notamment la mise en place
de certaines règles d'éthique et d'ordre ; je ne cache d'ailleurs
pas en la matière que je sois traditionaliste. Content aussi d'avoir pu
travailler dans d'aussi bonnes conditions et avec des personnes aussi intéressantes
que compétentes pendant tant d'années. Impert' : Vous étiez
déjà là en 1973 quand l'ESSEC a déménagé
à Cergy. Vous pourriez nous dire comment ça s'est passé ?
M. Vassiliev : Le déménagement a été une grande aventure
humaine commencée dès 1971 avec la constitution d'une équipe
dirigée par m. Gilbert Olivier, directeur de l'école à l'époque.
C'est le manque d'espace qui fut la raison première de ce déménagement.
En effet, bien que la vie dans le quartier latin soit très agréable,
les conditions de travail étaient devenues infernales avec la croissance
de l'école. Le déménagement s'est dans l'ensemble très
bien passé. La plupart des membres de l'administration ayant anticipé
ce déménagement en s'installant à Cergy avant la rentrée
1973. D'un point de vue financier, M. Gilbert Olivier avait mis en place un plan
d'emprunts et de remboursements sain vis-à-vis des conditions économiques
de l'époque (inflation forte). Les problèmes intervenus à
partir de 1980 s'expliquent par le changement de conjoncture. Cependant, après
un douloureux programme de dégraissage de personnel, la situation du groupe
est depuis redevenue saine. Impert' : Vous vous souvenez comment s'est passé
la première Nuit de l'ESSEC ? M. Vassiliev : Bien entendu à
l'époque, ce n'était pas un événement d'une ampleur
comparable à aujourd'hui. Il y avait au maximum 1000 personnes dans le
patio, et je ne garde que le souvenir d'un spectacle de saoûlographie entre
étudiants. Concernant la Nuit, permettez-moi une petite remarque : cela
fait des années que l'accident grave nous pend au nez. Je ne pense pas
qu'une soirée d'une telle carrure puisse se dérouler dans des conditions
de sécurité suffisantes dans les locaux de l'école. Et je
suis bien content qu'un tel accident n'ait pas eu lieu alors que j'étais
responsable d'une sécurité sur laquelle dans la pratique, je n'avais
aucune prise. Impert' : Diriez-vous que les étudiants de l'époque
étaient plus et fêtards que maintenant ? M. Vassiliev : On peut
dire qu'ils étaient différents
J'ai le souvenir dans les années
1974-1976 d'un groupe d'étudiants particulièrement remuants de 68tards
attardés. Ils étaient pour l'autogestion
Un jour, j'ai fini
par en venir aux main et j'ai bien évidemment gagné (NDLR : gasp
!!!). Impert' : L'administration reste floue sur les projets réalisés
ou non de construction de différentes extensions. Il figure notamment sur
les plans de la ville du SAN des extensions virtuelles. Qu'en est-il exactement
? M. Vassiliev : En 1990, un permis de construire a été demandé
pour un projet d'extensions en deux tranches. La première a été
construite est remise à temps. Quant à la deuxième, le chantier
a plusieurs fois été repoussé et la durée d'un permis
de construction étant de 3 ans, le projet est plus ou moins au point mort.
Impert' : de nombreuses rumeurs circulent concernant votre position vis-à-vis
des étudiants, des professeurs ou encore des autres membres de l'administration.
Pourriez-vous nous livrer une fois pour toutes votre opinion ? M. Vassiliev
: Pour moi, l'école idéal serait sans élèves et sans
professeurs ! Pour les élèves, je leur reproche de ne pas toujours
respecter les règles établies au sein de l'école. Ils oublient
trop souvent qu'ils sont avant tout ici pour travailler, ce qu'ils ne font par
la suite ne me concerne pas. Dans cette optique, ma position n'est pas facile
puisque mon rôle consiste précisément à faire en sorte
que toutes les personnes de l'école puissent travailler dans de bonnes
conditions. Pour les professeurs, je dirais qu'individuellement ils sont souvent
brillants et sympathiques mais qu'en tant que groupe ils sont pires que les étudiants.
Je considère que lorsque l'on travaille dans des conditions aussi avantageuses
surtout d'un point de vue financier, il ne faut pas venir réclamer ou se
plaindre pour des peccadilles égocentriques. J'ai parfois eu envie de leur
envoyer une bombe atomique sur la tête !! Impert' : M. Calamy a dit
de vous que vous étiez "un ours mal léché au Coeur d'or".
Qu'en pensez-vous ? M. Vassiliev : (rires) Un ours ? Pourquoi pas, si on considère
que j'ai reçu une éducation militaire et que je conçois l'ordre
et la discipline comme des règles de vie élémentaires. Quant
au reste, je pense que toute organisation doit être composée de gens
qui commandent et d'autres qui obéissent. Bien évidemment, les ordres
doivent rester cohérents pour assurer l'unité de l'ensemble. Le
tout, consiste à travailler en bonne intelligence en définissant
clairement la position et les rôles de chacun. C'est précisément
le problème avec les étudiants. Ils ne pensent plus qu'à
s'amuser alors qu'ils sont quand même dans une école où ils
sont supposés travailler un minimum. Impert' : Est-il vrai que vous
avez un grade d'officier dans l'armée ? M. Vassiliev : En fait, j'ai
le grade de lieutenant-colonel dans le corps des traducteurs puisque je parle
couramment le russe. Je suis donc bien officiellement officier de réserve
Impert' : Nous voudrions savoir ce que vous pensez du concept d'association et
de leur rôle dans le groupe ESSEC. M. Vassiliev : Les associations telles
qu'elles sont définies dans le cadre de la loi 1901 constituent à
mon sens un plus pour les étudiants du groupe ESSEC, tant que cela ne nuit
pas à leur travail
C'est pourquoi je suis d'accord avec le principe
de fournir des locaux aux associations à but non lucratif. C'est dans cette
optique que je considère que les associations réalisant un important
chiffre d'affaires à la seule fin d'enrichir leurs membres n'ont pas lieu
d'être dans les locaux du groupe. Je ne cherche pas ici à descendre
la JE bien que je n'apprécie guère leurs manières. Pour moi,
ils constituent une entreprise et, à ce titre, ne peuvent travailler dans
des locaux fournis gratuitement ; il vaudrait mieux qu'ils louent en dehors de
l'école en tant " qu'entreprise ". Impert' : Avant de partir,
auriez-vous un message à adresser aux étudiants de l'ESSEC ?
M. Vassiliev : Oui si vous y tenez. Vous êtes beaux, généreux
et instruits mais véritablement impolis. L'impolitesse constitue pour moi
un défaut majeur, et vous conviendrez que de bonnes manières et
le respect qui accompagnent la politesse sont des bases nécessaires à
toute instruction (NDLR : comme le disait d'ailleurs un fameux maréchal
de l'Armée Rouge : " avant l'instruction,
"). Votre présence
ici est votre dernière chance de vous positionner dans la vie active, alors
profitez-en en travaillant suffisamment pour ne pas le regretter par la suite
Propos recueillis par Judas et Fireball. Nous tenons ici à remercier Monsieur
Vassiliev qui nous a accordé une part de son temps pour la réalisation
de cette interview. Nous lui souhaitons une bonne et prolifique retraite.
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